Un livre pour Noël.1 : « Normal People », un roman de fiction réaliste

Paul Mescal et Daisy Edgar-Jones, les stars de la série adaptée du best-seller de Sally Rooney

« Normal People » ? Sally Rooney, l’autrice tendance qui sait « parler » à la génération millennial – qui n’est pas la mienne, au passage -, son adaptation en série tv qui a émue pas mal de monde…

Une série et un roman

au succès phénoménaux !

Connell et Marianne…Marianne et Connell… Entre le genre young adult et le roman d’apprentissage, leur histoire est un peu la nôtre. Il.elle nous font pleurer, nous agacent, nous bouleversent pendant quatre ans – nous les suivons entre leur 18 et 22 printemps. Les amants tourmentés, en compagnie desquels nous découvrons l’ouest de la République d’Irlande durant la décennie 2010, sont des gens « normaux » bien qu’ils en doutent souvent !

C’est ironique, j’étais convaincue que je n’aurais pas grand chose à écrire sur ce roman à succès… Je l’ai pourtant dévoré en quelques jours, malgré ma grande déception concernant la fameuse transposition sur petit écran (que je terminerai peut-être) : je ne souhaite « blesser » personne, mais cette histoire n’est pas télégénique ; scénarisée, elle en devient ennuyante à mes yeux ! Des pleurs, des conflits et des galipettes en permanence : j’ai l’impression que les deux gaéliques passent leur temps au plumard pour se rabibocher ! J’apprends que beaucoup de spectateurs.rices se pâment sur les réseaux sociaux au sujet de la façon attentionnée dont Connell se comporte au lit avec Marianne ; alors oui, le consentement sexuel, c’est primordial, mais cela n’apporte rien à l’intrigue ; le respect en matière de sexe ne suffit pas à créer un chef-d’oeuvre… Le casting – prodigieux – et la personnalité quelque peu inhabituelle du héros en sont les atouts majeurs.

Si vous avez aimé le livre ou souhaitez le découvrir, sachez que l’adaptation est extrêmement fidèle !

Parce que je suis happée en toi si souvent que j’ai oublié qui est qui


Un style littéraire « particulier »

Je ne suis pas sûre que l’autrice soit encore lue dans un siècle tant son style est peu recherché ; sa plus grande qualité se trouve peut-être en sa capacité à mettre à nu les questionnements et les faiblesses de ses personnages.

L’absence de guillemets pour les dialogues m’a agacée ; cela serait intéressant de poser la question à Mme Rooney : peut-être est-ce pour stipuler que les protagonistes vivent dans leur tête ? Mais, tous ses personnages ne sont pas des cérébraux introvertis…

Autant pour moi, je viens d’apprendre que les guillemets sont de moins en moins utilisés.*

Une héroïne et un héros

en proie au doute et à la solitude

Deux points de vues, masculin et féminin, sur la fameuse « normalité » : qu’est-il sain de penser, de faire, de ressentir ? Que présument les autres à notre sujet ? Comment être nous-même sans nous mettre nos proches à dos ? Des questions qui m’ont toujours remuées… Fait intéressant : les amis/amants n’ont pas ou plus de père. Est-ce que cela a du sens pour la romancière ? Connell possède un complexe social, Marianne un complexe psychologique. Bien que je ne considère absolument pas qu’une œuvre soit ratée lorsque je ne m’identifie pas à ses figures principales, j’avoue que j’ai du mal à « comprendre » le malaise social du jeune homme, et l’orgueil excessif qui en découle – et cela ne concerne pas que « Normal People » -, sans doute parce que je n’en ai jamais ressenti dans ce domaine. Petite digression, j’ai découvert que la raison première des ruptures amicales était liée à l’argent : j’aurais pourtant mis ma main au feu que c’était dû à la distance géographique, ou à la monotonie, ou encore à l’esprit de compétition !

D’après l’autrice, concernant ce sujet** :

Je pense que le mieux que je puisse faire c’est d’observer comment la classe, entendue au sens large de structure sociale, a un impact sur nos vies personnelles et intimes. C’est-à-dire comment on porte en nous les réalités matérielles et économiques dans nos relations interpersonnelles.”

Par contre, je suis en osmose avec « le beau gosse du lycée » quand il affirme rechercher à tout prix la normalité – à ce sujet, j’étais semblable à lui au même âge !

Tout ce qu’il voulait, c’était être normal, dissimuler les aspects de sa personnalité qu’il trouvait honteux et perturbants. C’était Marianne qui lui avait montré qu’une autre voie était possible. »

Des sardines…à l’huile d’olivier ?

Je me reconnais plus en Marianne, à travers ces lignes qui font foncièrement écho en moi – c’est toujours rassurant de se rendre compte que l’on est pas seul.e au monde… :

{…} Marianne voulait donner un sens à sa vie, elle voulait empêcher toute forme de violence du fort contre le faible, et se souvenait d’une époque, il y a plusieurs années, où elle s’était sentie si intelligente, jeune et puissante qu’elle aurait presque pu y arriver. Mais elle savait désormais qu’elle n’était pas puissante, et qu’elle vivrait et mourrait dans un monde d’une violence extrême contre les innocents, et qu’elle pourrait dans le meilleur des cas n’être utile qu’à une poignée de gens. Il lui était si difficile de se réconcilier avec l’idée d’être utile à une minorité, comme si elle préférait n’être utile à personne qu’accomplir quelque chose de si petit et si faible, mais ça non plus elle ne pouvait s’y résoudre… »

Je ne souhaite pas vous révéler des pans importants de l’intrigue, mais à la place de l’adolescente, j’aurais rompu définitivement avec le « chouchou » du bahut, car j’ai toujours exécré le genre de lâcheté dont il se rend coupable envers elle, et la plupart des gens populaires côtoyés durant ma scolarité avaient une mentalité écœurante (amusez-vous à chercher la définition de sociopathie dans le dictionnaire). Je me souviens d’une réflexion de ma génitrice, lorsque j’étais à peine moins âgée que nos héros : « Tu es trop entière »…, un trait de caractère que j’assume dans ce domaine !

Deux autres extraits pour conclure l’article, pour vous forger un début d’opinion

J’aime tant le patinage artistique, que le passage suivant m’a marquée !;) Plus sérieusement, je souhaite à tout le monde de ressentir cette osmose…

Parfois, il a l’impression que Marianne et lui sont des patineurs artistiques, improvisant leurs discussions avec une adresse et une synchronisation si parfaite qu’ils s’en étonnent tous les deux. Elle s’élance en l’air avec grâce, et chaque fois, ignorant comment il va bien pouvoir s’y prendre, il la rattrape. »

L’autrice décrit de façon satisfaisante l’emprise, la haine de soi, ou encore le poids de la pression sociale.

À l’école, les garçons avaient tenté de la briser à force de cruauté et de mépris, et à la fac les hommes avaient tenté d’y parvenir avec le sexe et la popularité, tous dans le but commun de dompter sa force de caractère. Ça la déprimait de trouver les gens si prévisibles. »


*Les dialogues sans guillemets sont de plus en plus populaires. Dans ce cas, le dialogue commence directement par un tiret cadratin sans guillemets ni au début, ni à la fin. Le reste du dialogue fonctionne comme le dialogue avec guillemets.

D’après l’article suivant :

https://www.mecanismes-dhistoires.fr/5- conseils-pour-mettre-en-forme-un-roman/

** : extraits de : Pourquoi il faut absolument voir la série “Normal People, disponible sur MyCanal ?, par Marthe Mabille. Vogue.fr, 19/05/2022; et de « Sally Rooney », pour Louisiana Channel (2019)

« Ce n’est pas pareil avec les autres »

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